L'Afrique de l'Ouest, plaque tournante du financement du Hezbollah


L'Afrique de l'Ouest est devenue un maillon essentiel dans le réseau de financement du Hezbollah, le puissant mouvement chiite libanais. Grâce à l'importante diaspora libanaise installée dans des pays comme la Côte d'Ivoire ou la Guinée, le Hezbollah dispose d'une base solide pour récolter des fonds et blanchir de l'argent issu d'activités illicites. Cette présence en Afrique permet au "Parti de Dieu" de diversifier ses sources de revenus et de contourner les sanctions internationales.




 Une diaspora libanaise influente

La communauté libanaise en Afrique de l'Ouest, estimée à plusieurs centaines de milliers de personnes, joue un rôle clé dans le dispositif financier du Hezbollah. En Côte d'Ivoire par exemple, près de 100 000 Libanais vivent dans le pays, dont 80% sont musulmans chiites. Le quartier de Marcory à Abidjan, surnommé le "petit Beyrouth", concentre une importante population d'origine libanaise.

Cette diaspora bien implantée dans les milieux d'affaires et influente dans les cercles politiques locaux fournit au Hezbollah :

- Une base de sympathisants et de donateurs potentiels

- Des réseaux commerciaux et financiers pour faire circuler l'argent

- Des relais logistiques pour ses activités


 Le système de la "zakat" et les contributions volontaires

Une partie du financement provient de contributions volontaires de la communauté chiite, notamment à travers la "zakat", une sorte de taxe informelle. De nombreux Libanais d'Afrique de l'Ouest versent ainsi indirectement de l'argent au Hezbollah, considéré comme un mouvement de résistance légitime.

Certaines sources évoquent également l'existence d'un système de racket institutionnalisé sur l'ensemble de la diaspora libanaise. Les montants exacts restent difficiles à évaluer tant le réseau est vaste et opaque.


 Blanchiment d'argent et activités illicites

Au-delà des dons, le Hezbollah s'appuie sur un vaste système de blanchiment d'argent lié à diverses activités illégales :

- Trafic de drogue

- Contrebande de diamants

- Commerce illégal de bois

- Trafic d'armes

Selon la Fondation pour la défense des démocraties (FDD), un think tank américain, 30% des revenus du Hezbollah proviendraient d'activités mafieuses. Les montants blanchis dépasseraient les 300 millions de dollars par an.


L'Afrique de l'Ouest sert de plaque tournante pour ces activités :

- Point de transit pour le trafic de drogue venant d'Amérique latine

- Zone de blanchiment de l'argent sale

- Hub logistique pour le transfert des fonds vers le Liban

La présence d'une importante diaspora libanaise facilite ces opérations en fournissant les réseaux et les couvertures nécessaires.


 Des connexions avec les cartels sud-américains

Le dispositif financier du Hezbollah s'étend bien au-delà de l'Afrique. Le mouvement a tissé des liens étroits avec les cartels de drogue colombiens et mexicains. L'Amérique du Sud est ainsi devenue une importante source de revenus à travers le narcotrafic.

L'argent de la drogue transite ensuite par l'Afrique de l'Ouest où il est blanchi avant d'être transféré au Liban. Ce système complexe permet au Hezbollah de brouiller les pistes et de rendre l'origine des fonds difficilement traçable.


 Un Etat dans l'Etat au Liban

Au fil des années, le Hezbollah est devenu un véritable Etat dans l'Etat au Liban. Le mouvement dispose de sa propre économie parallèle, s'appuyant sur :

- Le soutien financier de l'Iran

- Les réseaux mafieux internationaux

- Les contributions de la diaspora

Cette indépendance financière lui permet de maintenir une importante force militaire et d'étendre son influence politique au Liban et dans la région.


 Les défis de la lutte contre le financement

Démanteler les réseaux de financement du Hezbollah s'avère extrêmement complexe pour plusieurs raisons :

- L'opacité des circuits financiers

- L'imbrication avec l'économie légale

- Le soutien d'une partie de la diaspora

- La complicité de certains États

Les sanctions internationales peinent à tarir les sources de revenus du mouvement qui a su diversifier ses activités et ses relais à travers le monde.


 L'impact sur les pays d'Afrique de l'Ouest

La présence de ces réseaux en Afrique de l'Ouest soulève plusieurs problèmes pour les pays concernés :

- Développement d'une économie souterraine

- Corruption de certains responsables

- Risques sécuritaires liés au trafic d'armes

- Image internationale dégradée

Cependant, le poids économique de la diaspora libanaise rend difficile toute action énergique des gouvernements locaux.


 Perspectives et enjeux

Le démantèlement des réseaux de financement du Hezbollah en Afrique de l'Ouest représente un défi majeur pour la communauté internationale. Plusieurs pistes sont envisagées :

- Renforcement de la coopération internationale

- Meilleur contrôle des flux financiers

- Lutte contre la corruption

- Sensibilisation des diasporas


L'enjeu est de tarir les sources de financement du mouvement sans pour autant déstabiliser l'économie de pays déjà fragiles.

La question du financement du Hezbollah en Afrique de l'Ouest illustre la complexité des liens entre diaspora, criminalité organisée et mouvements politico-militaires. Elle met en lumière les défis de la lutte contre le financement du terrorisme dans un monde globalisé où l'argent circule facilement d'un continent à l'autre.

Alors que les tensions restent vives au Proche-Orient, le tarissement des ressources financières du Hezbollah apparaît comme un enjeu crucial pour la stabilité régionale. L'Afrique de l'Ouest se retrouve ainsi, malgré elle, au cœur d'un conflit qui la dépasse largement.

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